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Représentation équilibrée des femmes et des hommes dans le cadre des élections professionnelles

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Publié le
21/1/2024
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Lors de la mise en place des élections professionnelles au sein de l'entreprise, les règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes, appelées également règles de parité des listes, s’appliquent pour les listes syndicales au premier tour des élections professionnelles.

En effet, depuis le 1er janvier 2017, les listes de candidats aux élections professionnelles doivent respecter le principe de représentation équilibrée des femmes et des hommes (loi n°2015-994 du 17 août 2015, modifiés par l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017).

C’est dans cadre que le Cabinet BASIC ROUSSEAU AVOCATS a obtenu l’annulation de l’élection des deux candidates titulaires surreprésentées dans le collège ouvriers-employés.                              

(TJ Brest, 8 janvier2024, n°11-23-000750)

Sur le rappel des règles

 Aux termes de l’article L.2314-30, alinéa 1er du Code du travail :

« Pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l'article L.2314-29 qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. Les listes sont composées alternativement d'un candidat de chaque sexe jusqu'à épuisement des candidats d'un des sexes.
Lorsque l'application du premier alinéa n'aboutit pas à un nombre entier de candidats à désigner pour chacun des deux sexes, il est procédé à l'arrondi arithmétique suivant :
1° Arrondi à l'entier supérieur en cas de décimale supérieure ou égale à 5 ;
2° Arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5.
En cas de nombre impair de sièges à pourvoir et de stricte égalité entre les femmes et les hommes inscrits sur les listes électorales, la liste comprend indifféremment un homme ou une femme supplémentaire.
Lorsque l'application de ces règles conduit à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, les listes de candidats pourront comporter un candidat du sexe qui, à défaut ne serait pas représenté. Ce candidat ne peut être en première position sur la liste.
Le présent article s'applique à la liste des membres titulaires du comité social et économique et à la liste de ses membres suppléants. »

La jurisprudence précise que si une organisation syndicale est en droit de présenter une liste comportant moins de candidats que de sièges à pourvoir, donc incomplète, elle doit nécessairement respectée la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré (Cass.soc., 17 avr. 2019, n° 17-26.724, Publié au bulletin).

Dans un autre arrêt, la Chambre sociale de la Cour de cassation précise que le protocole d’accord préélectoral doit indiquer la proportion de femmes et d’hommes composant le chaque collège. (Cass. soc., 11 déc. 2019, n°18-20.841, Publié au bulletin)

Le juge a posé dans cette décision également la règle suivante : un syndicat signataire du protocole et qui a présenté des candidats sans réserve n’est pas recevable, postérieurement aux élections, à contester le pourcentage différent de celui figurant dans le protocole préélectoral pour légitimer les candidats qu’il a présentés.

Dans la continuité de la jurisprudence précitée, la Haute juridiction considère que la liste doit comporter au moins deux candidats de sexe différent dont l’un au titre du sexe sous-représenté dans le collège (Cass.soc., 11 déc. 2019, n° 18-23.513, Publié au bulletin).

Dans le même sens, la Chambre sociale a censuré un jugement pour avoir considéré que la liste présentée pour les titulaires du troisième collège, qui ne contient que sept candidats (quatre hommes et trois femmes), n’encourt aucun grief au regard tant des règles de concordance que de celle de l’alternance.

Pour le Juge, «  en statuant ainsi, alors qu’il avait constaté que la liste incomplète de candidats présentée par le syndicat CFDT, comportant quatre hommes et trois femmes, ne respectait pas la proportion respective des femmes et des hommes dans le collège considéré rappelé par le protocole d’accord préélectoral prévoyant, pour le troisième collège, qu’une liste complète de dix postes devait comporter sept hommes et trois femmes et qu’une liste incomplète de sept candidats devait comporter cinq hommes et deux femmes, ce dont il aurait dû déduire que l’irrégularité constatée entraînait l’annulation de l’élection d’un nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d’hommes que celle-ci devait respecter, soit, à raison de la surreprésentation du sexe féminin par une candidate en surnombre sur la liste, l’annulation de l’élection de la dernière élue surnuméraire, c’est-à-dire Mme Q…,celle-ci fût-elle seule élue pour avoir été présentée en tête de liste, le tribunal a violé les textes susvisés. »

(Cass.soc., 3 mars 2021, n° 20-10.470)

La Chambre sociale a posé également le principe selon lequel : « Les dispositions de l’article L. 2314-30, éclairées par les travaux parlementaires, s’appliquent aux organisations syndicales qui doivent, au premier tour pour lequel elles bénéficient du monopole de présentation des listes de candidats et, par suite, au second tour, constituer des listes qui respectent la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Elles ne s’appliquent pas aux candidatures libres présentées au second tour des élections professionnelles ». (Rapp. AN n°2792 et débats 1ère séance du 28 mai 2015, Cass. soc., 25 nov. 2020, n°19-60.222, Publié au bulletin).

Les conséquences de l’élection d’un candidat du sexe surreprésenté

 L’article L.2314-32, alinéa 3 du Code du travail prévoit que

« la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L.2314-30 entraîne l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter. Le juge annule l'élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l'ordre inverse de la liste des candidats. »

La jurisprudence précise que le titulaire dont l’élection a été annulée ne peut être remplacé par son suppléant (Cass. soc., 22 sept. 2021, n°20-16.556)

Le considérant 5 de la décision stipule qu’il « résulte de ces textes que lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l’article L. 2314-30 du Code du travail, c’est-à-dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté. Lorsque l’application des règles de proportionnalité et de l’arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, il résulte de l’article L. 2314-30 du Code du travail que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l’article L. 2314-30 étant d’ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger. »

Le considérant 7 de la décision prévoit qu’« en application du troisième alinéa de l’article L. 2314-32 du Code du travail, la constatation par le juge, après l’élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2314-30 entraîne l’annulation de l’élection d’un nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d’hommes que celle-ci devait respecter. Le juge annule l’élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l’ordre inverse de la liste des candidats.

La décision commentée

Le contexte du litige

En l’espèce, le protocole d’accord préélectoral prévoyait que le nombre de sièges à pourvoir au sein du comité social et économique était de 13 titulaires et 13 suppléants, réparti au sein de trois collèges.

Ce protocole précisait que les effectifs de l’association se répartissaient au sein du premier collège « ouvriers et employés »à hauteur de 85,17% de femmes et de 14,83% d’hommes et que 10 sièges de titulaires et 10 sièges de suppléants devaient être attribués à ce collège. Les listes devaient donc être composées de 8 femmes et de 2 hommes.  

Aucune des organisations syndicales signataires n’a contesté le protocole d’accord préélectoral.

Toutefois, deux syndicats, ayant déposé une liste commune, ont présenté une liste composée exclusivement de candidatures féminines. À l’issu du second tour des élections,5 sièges ont été pourvus sur cette liste dans le premier collège, composés donc de 5 femmes.  

Or, conformément à la répartition entre les femmes et les hommes prévue dans le protocole d’accord préélectoral, les listes présentées par chaque syndicat devaient comporter 2 candidatures masculines.  

L’un des syndicats signataires du protocole a donc contesté ces désignations et a demandé que soient annulées les élections des derniers élus du sexe surreprésenté. 

Jugement obtenu dans le cas qui nous intéresse

Le tribunal judiciaire de Brest a, d’abord, rappelé que, compte tenu du caractère d’ordre public absolu des dispositions de l’article L.2314-30 du Code du travail, l’absence de candidature masculine ne peut justifier d’écarter les modalités tendant à assurer la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des listes établies par les organisations syndicales. 

Ensuite, la sanction du non-respect, par une liste de candidats, des prescriptions prévues à l’article L.2314-30 du Code du travail consiste en l’annulation de l’élection d’un nombre d’élus du sexe surreprésenté, égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d’hommes que celle-ci devait respecter, ensuivant l’ordre inverse de la liste des candidats.  

Par conséquent, le juge a annulé les élections au sein du comité social et économique des deux dernières élues de la liste commune, et a condamné solidairement les deux syndicats au paiement de 1.000 euros au titre de l’article700 du Code de procédure civile.

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